Fin de l’argent liquide : ce que risquent les Français

La rédaction
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Fin de l’argent liquide : ce que risquent les Français
Fin de l’argent liquide : ce que risquent les Français !-© Getty images

La France tend vers la fin du cash… Qu’est-ce qui attendent vraiment les Français ? Le point sur ses conséquences.

Fin de l’argent liquide : ce que risquent les Français

« Nous sommes de plus en plus incités à ne plus utiliser d’argent liquide, une façon de mieux tracer les flux financiers, une facilité de paiement aussi. Mais c’est aussi une perte d’anonymat, et donc de liberté », regrette Gaspard Koenig.

« Cette modeste discipline me permet de donner des pièces aux SDF, de laisser des pourboires, de ne pas enrichir exagérément les banques (qui prélèvent 0,3 % sur chaque paiement par carte !) et surtout, surtout, d’effectuer des achats sans laisser de trace, en cultivant cette part de secret, fût-elle dérisoire, sans laquelle nous nous retrouverons un jour nus devant la machine », poursuit celui-ci dans les colonnes du journal Les Echos.

« À l’inverse, la traçabilité du moindre flux financier permise par la « cashless société » va inévitablement tendre à moraliser et politiser nos transactions(…) Privé de zone grise, le citoyen acheteur va s’interdire les déviances comme les extravagances. Et l’on voit mal comment l’Etat résisterait longtemps à la tentation, sous couvert de lutte contre le blanchiment, de lancer ses algorithmes à la recherche de toute donnée suspecte« , poursuit Gaspard Koenig avant de conclure qu' »Il vaut mieux tolérer quelques fraudeurs que de mettre toute une population sous surveillance. »

Cette analyse résume parfaitement les conséquences à venir de la disparition de l’argent liquide.

Les SDF, victimes collatérales de la dématérialisation de l’argent.

En France, la plupart des achats se font aujourd’hui sans argent liquide, une tendance qui a été amplifiée par la pandémie de Covid-19.

Cette dématérialisation impacte d’ailleurs déjà sur les personnes sans-abri. Comme indiqué par nos confrères de 20 Minutes, les passants ont de moins en moins de pièces à donner.

« C’est juste la routine désormais, les gens donnent beaucoup moins qu’il y a dix ou vingt ans. », Déplore Alain, sans-emploi ni abri depuis 25 ans.

Le problème, analyse-t-il, ce n’est pas parce que les passants ne veulent plus, « c’est qu’ils ne peuvent plus. Ils paient tout en carte bleue, n’ont plus de pièces à donner…»

Selon la Banque de France, « billets et espèces ne constituent plus qu’un quart des paiements physiques (sans compter l’e-commerce) dans le pays ».

Christelle, SDF depuis 10 ans, partage son inquiétude : « L’argent liquide disparaît, et avec lui, les dons des gens dans la rue. En 2030, les gens n’auront plus une pièce. On va vers la dématérialisation totale de l’argent, et comment on fera nous ? ».

Le sociologue spécialiste de la pauvreté, Julien Damon, souligne que « Tout se dématérialise, que ce soit l’argent ou le travail(…) Mais la mendicité ne se télétravaille pas elle, ni ne se dématérialise. »

Il ajoute que « Même dans certaines églises, il est désormais possible de faire la quête en carte bleue ».

Alain ajoute : « Au tout début, quand quelqu’un me répondait qu’il n’avait pas de pièce sur lui, il avait un peu honte, baissait les yeux. Ce n’était pas très crédible comme excuse. Maintenant, soupire-t-il, ils le disent avec aplomb, ils savent que c’est normal à notre époque. Les gens se sentent moins obligés, il y a la raison parfaite et crédible pour ne rien donner ».

Gare à la disparition des distributeurs automatiques !

« Avec le sans-contact, on n’a pas vraiment l’impression de payer, cela peut entraîner une perte de conscience de nos limites », avertit pour sa part, Nicole Prieur, philosophe et psychothérapeute.

À l’heure actuelle, de nombreuses banques tendent également à supprimer les distributeurs automatiques. Elles ont été 5000 à partir en fumées entre 2018 et 2021, selon la Banque de France.

Un phénomène qui ne manquerait pas de s’intensifier d’ici à 2025 avec la fusion du réseau des distributeurs de BNP Paribas, Société Générale et Crédit Mutuel.

À quand la fin des espèces ?

Les choses avancent progressivement vers un « monde sans espèces« , mais cela n’est pas encore pour demain, en raison des difficultés « qu’une partie de la population rencontre pour adopter les modes de paiement numériques ».

« Les anciens aiment avoir du liquide dans leur porte-monnaie, confie Jocelyne, ancienne infirmière de 72 ans. Sinon, ils ont l’impression d’être pris en défaut. D’accord, il y a la carte bancaire, mais parfois on ne se souvient pas du code, indique-t-elle. Même remplir un chèque devient compliqué. »

De plus, il subsiste « un risque de cyberattaque ou de panne d’électricité. »

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